mercredi 17 avril 2013

Rafaat Mrad Dali : le FMI et "le vrai et le faux" de Chedly Ayari, Gouverneur de la banque centrale de Tunisie.

Siège du FMI

Suite à la déclaration de Chedly Ayari le 16 avril 2013 en prévision du prêt FMI en cours de négociation et dans laquelle il précise les faits suivants : «La Tunisie a besoin de ce matelas de sécurité, mais elle n’est pas pour autant au bord de la faillite». « C'est le premier recours au FMI depuis 1986, mais les conditions ne sont pas les mêmes. En 1986, nous étions au bord de la faillite et n'avions pas de devises, alors qu’aujourd'hui, nous avons l'équivalent de 8,6 milliards de dollars de réserves et une croissance de 3,6% en 2012 »(voir le site Leaders : http://www.leaders.com.tn/article/la-tunisie-et-le-fmi-proches-d-un-accord-pour-l-octroi-d-un-pret-de-1-75-milliard-de-dollars?id=11228#commentSection),
je souhaite apporter, en tant que témoin actif de cette période des années 80, les précisions suivantes :

Christine Lagarde

le Vrai : le FMI accordera sans aucun doute et incessamment le prêt de 1.75 milliard de dollars. La présidente Christine Lagarde (qui a été une des premières personnalités internationales à visiter notre pays en post révolution) et le bureau du FMI soutiennent particulièrement cette initiative en faveur de la Tunisie post-révolutionnaire en plein cheminement démocratique tout en encourageant vivement les autorités tunisiennes à mettre en place tous les outils nécessaires et performants permettant d'accompagner avec plus de rigueur la gestion future de ce fonds et à améliorer les conditions et l'environnement compatibles avec une meilleure croissance économique, comme l'a d'ailleurs justement souligné le ministre des finances Elyes Fakhfakh.

Le Faux : Contrairement aux affirmations de Chedly Ayari qui évoque injustement "la faillite de fin 86", en 1986 et ce depuis les années 80, sous l’initiative du gouvernement Mzali ( Mohamed Mzali était alors premier ministre de l'époque), la Tunisie a connu en faveur de l'économie et de l'emploi, une avalanche de méga-projets sans précédents dont je cite quelques uns à toutes fins utiles :
  • les dizaines de banques européennes et arabes de développement qui se sont installées pour la première fois en Tunisie avec dans leurs paniers des fonds en devises importants.
  • C'est ainsi que de grands projets économiques ont vu le jour en ce temps là (ex : l'énorme projet du Lac (assainissement et urbanisation) qui a crée des milliers d'emploi, l'installation de centaines d'entreprises exportatrices, la réalisation de l'autoroute principale longeant le littoral, les multiples infrastructures mixtes avec l'Algérie soeur, le grand canal creusé par les chinois qui traverse le Cap Bon et qui a enrichi l'irrigation, la fourniture en eau potable et l' agriculture, les forages profonds multiples pour les cultures dans le sud du pays (développement de la culture sous serre), les dizaines de facultés, universités, hôpitaux, lycées, infrastructures touristiques créées dans tous le pays etc..
    Feu Mzali Mohamed, ancien PM
  • Bien sûr, tout grand économiste de renommée qu'il soit, Monsieur Chedly Ayari n'en dit rien et parle de faillite et pourtant il en sait quelque chose et nous aussi. Son CV sur Wikipedia fait silence comme par hasard de sa carrière durant toute cette période et celle qui vient après, comme si les anciens réflexes persistaient.
  • Pour la vérité historique, en somme, en cette période, rarement autant de devises étaient rentrées dans le pays,  les finances étaient là accompagnant les multiples projets sus-cités et d'autres mais la diminution des réserves de la banque centrale était une opération organisée de manipulation classique de chiffres montée par la bande à Ben Ali avec également la complicité du Gouverneur de la Banque centrale de l'époque ( qui s'en est mordu les doigts ensuite et a fait son mea culpa depuis (Hamadi Skhiri))  pour une déstabilisation politique du gouvernement de l'époque rentrant dans le cadre de la lutte classique du pouvoir autour d'un Habib Bourguiba vieillissant et qui préparait déjà, inconsciemment, dès 1986 la gouvernance pour la mafia politico-financière qui a sévi durant 23 ans et servi "la famille et les alliés" aux dépens de tout le reste et des autres régions déshéritées. Il s'est effectivement suivi, dès fin 1986, de la prise de contrôle de tous les rouages de l’état par le clan du dictateur déchu, encerclant et isolant dans son palais de Carthage un Bourguiba laissé aux « bons soins » de sa nièce « aux ordres » Saida Sassi. La meilleure preuve, c'est que 3 mois après la supposée "faillite", Rchid Sfar installé fin 86 par cette même mafia, Premier ministre de façade sans prérogatives, annonce avec grand fracas, haute voix et preuves à l'appui, que l’économie et les finances tunisiennes se portaient désormais très bien. (Voir journaux de l’époque). C'était tout bonnement "un miracle de la nature" jamais observé dans aucune référence économique ou financière de ce bas monde et c'est ce qui confirme le coté « farce » de la chose. Hélas, l'honnêteté intellectuelle fait toujours défaut et l'on continue à diffuser le refrain de la tromperie Ben Alienne aux tunisiens.

Je ne souhaite pas dire plus sur Chédly Ayari que je connaissais bien mais celui-ci ayant eu le courage de présenter récemment ses excuses au peuple tunisien avant sa nomination en tant que Gouverneur de la banque centrale, il a donc désormais mon respect et je persiste à croire qu'a son âge avancé, l’intérêt général et la conscience prévalent désormais sur les intérêts de lobbies et les ambitions personnelles.
Enfin pour conclure, à partir de fin 1986, c'est bien avec le gouvernement de Rchid Sfar, que la Tunisie est entrée doucement et sûrement dans la difficile phase de la faillite politique qui s'est associée, dès le complot médical de 1987,  à celle de la dictature de la mafia familiale politico-financière qui a sévi durant 23 ans grâce, entre autres,  aussi au silence complice de certains politico-technocrates très « compétents » et très « galonnés ».
Chedly Ayari



Oui, comme le souligne Chedly Ayari dans son dernier communiqué, c'était le premier recours au FMI depuis 1986 mais il aurait du ajouter que, contrairement à la situation actuelle dans laquelle la conjoncture difficile nous presse d'intervenir auprés du FMI, Mr Mzali jugeait que l'octroi de ce prêt n'était pas nécessaire au vu de la conjoncture de l'époque et ce malgré les demandes pressantes du FMI pour qui la Tunisie était considérée largement crédible pour un prêt encore plus important que celui-ci. En effet, la Tunisie en ce temps là, en plein développement et croissance avec un surplus de projets en chantiers, ne nécessitait pas, d'après lui, de prêt institutionnel à l’époque, des prêt d'ajustement classiques ponctuels étaient suffisants. Mais la cabale politique était déjà en marche fin 1986 pour une grande tromperie des tunisiens et du pays qui devait durer de longues années avec son lot d'inégalité sociale criante, de déliquescence des valeurs, de manipulation, bref tous les ingrédients d'un état mafieux. Vous connaissez tous la suite et nous en payons encore les conséquences.
Ceci dit, ce prêt actuel du FMI vient à point pour aider la Tunisie à traverser cette période de tempête provisoire sachant qu'elle a tout pour réussir sa démocratie dans les meilleurs délais, j'en reste convaincu.

J'ai tenu à écrire ce témoignage en hommage à un grand patriote qui a servi longuement et loyalement son pays aux cotés du leader Habib Bourguiba. Sa trace, il l'a laissé à travers les multiples réalisations sociales, éducatives, économiques, politiques et sportives qui portent toujours son empreinte. C'est ainsi que l'on juge le passage d'un homme politique. Comme aujourd'hui dans nos sociétés, les médiocres cherchent vainement à s'imposer sur les meilleurs, le mal veut prendre le dessus sur le bien. C'est ainsi qu'ils avaient cherché désespérément à le salir parce qu'il était propre et n'était esclave d'aucun lobby malfaisant. Mais jusqu'au bout, Mohamed Mzali est resté debout. 

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