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Rafaat Dali
رفعت مراد
الدالي
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Beji Caid Essebssi |
L’opacité dans
la gouvernance
RD : Quand il s’agit de l’opacité dans la gouvernance qui semble
être à l’origine des soubresauts dans une transition démocratique post
révolutionnaire, cela devient inquiétant et les révolutions n’aiment pas
l’opacité. Qu’on se le dise..
Le traitement des faits divers et violences que l’on doit
distinguer des manifestations pacifiques légitimes et auxquels on assiste
presque quotidiennement dans le pays, touchant de multiples secteurs,
interpellent le plus novice des novices en politique. . .
Après un préjugé favorable accordé à l’expérience réelle et
l’ancienneté de notre premier ministre Beji Caïd Essebssi, voila que s’installe
progressivement le malheureux désenchantement.
L’homme de la rue vous dit que les anciennes manœuvres
douteuses sont toujours présentes, l’état d’esprit qui oriente et guide
les décisions si délicates soient t’elles de cette transition est calqué
sur celui de l’ex régime politico mafieux.
Conséquence logique, ça grince.
Qui a intérêt à jouer ce jeu, à gagner du temps, à jouer au
quotidien avec les manœuvres de diversion télécommandées qui consistent à
monter les tunisiens contre les autres, à placer au vu de tous, leurs amis
et les amis des amis de la mafia politicofinancière encore omniprésente?.
Les initiatives fortes nécessaires à toute transition post révolutionnaires
sont rares et peu suivies d'effets réels. La rue observe, analyse, comprend ce
jeu malsain d’« affaiblir la révolution et récupérer le pouvoir »
et commence à s’impatienter sérieusement..
Poser les questions simples et d’actualité à ce
gouvernement provisoire.
RD : L’appel Républicain, mouvement crée dans la suite du Front
Tunisien de Salut National (FTSN), opposant historique à l’ex régime et
dont le visa, par le saint esprit de la politique politicienne tunisienne n’est
toujours pas accordé !!!!!! a décidé à travers les colonnes du
journal « l’Audace » de poser les questions simples et d’actualité à
ce gouvernement provisoire.
Celles, dans l’actualité pressante, qui se posent
actuellement suite à cette vidéo de Farhat Rajhi méritent des éclaircissements
:
- qui est derrière cette intervention au cours de laquelle
les questions posées n'étaient pas innocentes?
- qui a intérêt à la diffuser en ce moment?
- qui a intérêt à pointer du doigt une région par rapport
aux autres et cacher ainsi d'autres dysfonctionnements régionalistes ?
- qui veut écarter l'armée ou l'affaiblir en ces moments
délicats de la transition ou de la poussée de fièvre à nos frontières
libyennes?
A propos de la sécurité, base de toute confiance
RD : la démocratie et les démocrates savent distinguer les
manifestations de contestation respectant l’ordre public de celles avec
violences sans raisons, paralysant le fonctionnement des établissements publics
ou privés. Les premières sont légitimes et positives, les secondes sont
inacceptables .
Question : Alors comment expliquer par quel miracle les
premières sont rapidement et fermement dispersées alors que les secondes
(telles que les fuites de prisons ou celles des stades) se voient assistées
passivement par des forces de l’ordre semblant être missionnés en tant
qu’observateur plutôt que de gendarmes ?
Question : Comment analyser l’absence d’informations
quant aux résultats des enquêtes supposées être diligentées, leur
origine, leurs décideurs, leur objectif etc ?
La violence, ici et là, est citée ( fuites simultanées et
organisées de prisons, mises à sacs, violences dans les stades etc..) mais pas
d’enquête rapportée, aucun résultat n’est publié mais la rumeur bien manipulée
dresse rapidement des pseudo coupables visés par la désinformation mais les
vrais coupables, ils sont au poste de commandement. Sont t’ils toujours de
connivence les « maîtres chanteurs », « les chantés » et
l'argent roi des mafieux.
Est-ce la Tunisie des dossiers de la police politique et des
services spéciaux de Ben Ali (Ganzoui, Sériati et compagnie) qui planent
toujours sur la tête de ces décideurs qui, aux ordres par peur, distribuent les
cartes et le jeu au cas par cas ?
Depuis on est en droit de se méfier de tout y compris
du scénario etabli pour cette transition
RD : Question : Pourquoi ne pas imaginer que le
scénario de la haute assemblée constituante après le 24 juillet, oui on dit
bien après le 24 juillet, celui qui va donner naissance à la nouvelle
constitution et au second prochain gouvernement transitoire, n’aura été qu’une
grande farce pour gagner du temps, beaucoup de temps et laisser les palabres
pointilleuses sur tel ou tel article juridique, occuper la haute
assemblée, la rue et l’opinion publique ?.
Pendant ce temps, la mafia se réorganise et elle croit
laisser s'installer progressivement la fatigue et la lassitude..
Ainsi les dossiers de justice et la transition démocratique
prendront, selon leur volonté, le temps qui faudra.. ??
Oui, maintenant ils semblent être prêts pour la date du 24
juillet, leur système étant confortablement mis en place pour que la prochaine
assemblée constituante, qui décidera au nom du peuple, soit majoritairement de
leur couleur..
Quelle justice nous voulons ?
RD : Ce n’est un secret pour personne, la justice post
révolutionnaire est la première institution à renforcer et mettre en place.
Elle doit rendre rapidement justice aux milliers de victimes de l’appareil
tortionnaire politicomafiofinancier de l’ex président déchu.
Question : comment expliquer ces parodies de procès
déjà édifiés contre des gardes rapprochés de l’ex système et qui constituent
une insulte a l’intelligence des tunisiens ? ces hommes de main, inutile
de les citer maintenant, les tunisiens avertis les connaissent par cœur et
attendent la suite et du concret..
Refus de visa pour l’Appel Républicain et d’autres
partis : un acte politique malsain et peu éthique
RD : En transition démocratique, l’on retrouve en première ligne
les anciens partis ceux vitrines d’appui et ceux d’opposition gérés
anciennement par les ex locataires du palais ( ce n'est plus un secret de
polichinelle) puis les nouveaux arrivants qui se présentent au fur et à
mesure. Les uns sont authentiques, d’autres recrutés par les cabinets
ministériels spécialisés toujours en partie aux ordre des tireurs de ficelles
de l’ancienne mafiapoliticofinancière.
En démocratie donc, on ne limite jamais les autorisations de
visas sauf risque pour la sécurité ou l’ordre public.
Alors Pourquoi le gouvernement provisoire lui même n’ayant
pas de légitimité démocratique refuse d’accorder de façon égale les visas
de constitution à toutes les demandes de partis?
Selon quelle logique éthique, peut il retirer le droit de
s’exprimer pour un parti et permettre aux autres amis de s'exprimer? d’autant
plus qu’il semblerait que le motif de refus visé par l'administration (..vous
ne répondez pas à l’article 6 et 11 ???) est un copié-collé pour être
attribué de la même façon aux malheureux destinataires du refus..
Mais c’est quoi exactement les articles 6 et 11, aucune
explication ou point précis n'est formulé ???
Sur quelle base transparente les visas aux partis sont
accordés ?
En poussant plus loin la logique, selon quelle légitimité,
monsieur Béji Caïd Essebssi, ses hommes et les cabinets occultes peuvent t' ils
interdire de nouveaux partis?
Nous nous interdisons de pousser plus loin l’analyse et nous
laissons à d'autres le soin de dévoiler d’autres procédures douteuses dans ce
premier temps et ce afin de respecter la cohésion nationale.
Plus jamais les anciennes méthodes et stratégies. Oui
au pragmatisme transparent non aux manœuvres opaques.
RD : Il n’y a pas une famille tunisienne qui n’ai pas un fils,
un parent, un voisin qui n’a pas subi l’injustice, l’humiliation ou des
traitements dégradants ordonnés par la machine infernale Ben Aliste.
Nous aussi, partisans, membres et amis de l’Appel
Républicain ex Front Tunisien de Salut National (FTSN) avons, pour certains
d’entre nous, partagé cette souffrance, connu les caves du ministère de
l’intérieur, côtoyé des Ganzoui, des Hammi, des Sériati, et la liste est longue
( ils sont tous fichés tous à Interpol avec d'autres et le journal « L’audace »
a le grand mérite de les avoir repris depuis longtemps) de la direction de la
sûreté d‘état, les chaises des renseignements généraux, les coups des
tortionnaires et les humiliations des inhumains, les insultes des déséquilibrés
aux services des tyrans, les exactions et injustices faites à nos familles, à
nos proches et aux centaines de nos amis. Nous avons connu l’exil et
l’opposition pour alerter l’opinion internationale, avec d’autres mouvements,
et faire savoir que le peuple tunisien est en cage, qu’il est exploité,
opprimé, réprimé, violenté et que les amis de Ben Ali ( ils se reconnaîtront )
vous mentent en vous disant que c’est une "dictature minime" qui
tient en respect un peuple potentiellement dangereux, encore immature pour
une démocratie et qui peut à tout moment se transformer en islamiste
terroriste du fait de leur religion.."Nous sommes les remparts de
l'occident contre les extrémismes de nos peuples" se réclament les tyrans,
slogans relayés par leurs sbires de la sphère politique et d'une partie de la
société civile de l'époque.
Alors messieurs et mesdames de la gouvernance, ne volez pas
cette révolution si vous avez un brin de conscience.
Plus jamais les anciennes méthodes et stratégies.
Oui au pragmatisme transparent non aux manœuvres opaques.
Les valeurs d’abord, le reste suit
RD : les valeurs doivent guider en premier toutes nos
réflexions, actions et stratégies ; les valeurs qui rassemblent la
majorité des tunisiens et non celles d’une catégorie privilégiée.
Ces valeurs spécifiquement tunisiennes savamment associées à
celles universelles donneront l’essence de la démocratie à la tunisienne.
Il ne s’agit pas de singer bêtement les points faibles, ceux
qui risquent de nous mener à l’individualisme, la solitude, le matérialisme débordant,
l’éclatement de la famille, le déficit de valeurs, mais de ne
retenir que les points forts, ceux qui tirent « l’homme » et l’humanité
vers le haut.
Le mental des "dirigeants sous contrôle" ne doit
plus fonctionner selon le modèle Ben Aliste pré-révolutionnaire et il doit
évoluer vers celui qui manage une authentique démocratie. A défaut nous revoilà
parti pour une démarche intellectuelle déficiente associée à un sacré
déficit de valeurs...
Quelle légitimité nous voulons ?
N’oublions jamais que la seule légitimité est celle du
peuple, ce peuple qui s’est soulevé comme un seul homme dans toutes ses
composantes et ce ne sont pas les plus nantis qui ont été les premiers au
front.
La légitimité démocratique ne peut être que celles du
référendum et des urnes. Nous y parviendrons après cette transition
démocratique, cela prendra un peu de temps mais commençons d’ores et déjà à
exercer pleinement la transparence réelle en travaillant l’intérêt général loin
de tout clanisme ou régionalisme. La vison donnée de certains privilèges que
nous éviterons de citer, sont contraires à cette démarche qui doit
être une règle fondamentale en démocratie, qu’on se le dise aussi et le plus
souvent possible.
Révolution, démocratie, quel avenir ?
RD : Monsieur Béji Caid Essebssi a le choix maintenant entre la
transparence, le courage et l’indépendance totale à l’égard de ces forces quasi
mafieuses d’une part ou bien l’échec assuré.
Il est grand temps de réfléchir à l'hypothèse de
faire rapidement le ménage que ce soit avec ce gouvernement s'il en a le
courage réel ou avec un autre authentiquement carapacé pour
démanteler la branche politicoMafioFinancière du Ben Alisme, quitte à repartir
à zéro, avant que cela ne s’enlise de nouveau..
Nul doute qu’au final, la Tunisie aura sa démocratie. Mais
elle a entre-temps été dupée et un temps précieux (gagné par la mafia) a
été perdu pour la révolution.
Ce gouvernement transitoire, s’il n’est pas en mesure de
rectifier le tir (et tous les signaux, hélas, ne sont pas au vert) doit-il
laisser la place à un gouvernement révolutionnaire provisoire "sans peur
ni reproche" n’ayant eu aucune accointance ni de près ni de loin
avec le passé de Ben Ali et son appareil politico-mafieux ??
Les tunisiens dans leur immense majorité privilégient le
sens de la mesure et le font prévaloir sur les passions. La
révolution tunisienne a su éviter le chaos et la guerre civile. Ce n’est pas un
hasard.
Il est toujours temps de corriger le tir. A défaut, le
champs est libre pour la fuite en avant.
C’est déjà pour nous tous un grand bonheur d’avoir vécu
cette révolution et de pouvoir assister encore à ces révoltes pour la dignité
et la liberté autour de nous. Après les perturbations d’usage
post-révolutionnaires que les tunisiens sont à même de corriger, les jeunes
pourront espérer vivre dans un monde meilleur.
Le tunisien a toujours su marier intelligemment ses propres
valeurs et sa culture avec la modernité et les principes universelles..
Faisons tous ensemble pour que ce soit ainsi avec la
dignité et la liberté en plus.
« La révolution tunisienne est un modèle pour
toute la région, qui ne doit pas échouer ».
La révolution vaincra et la démocratie réelle s'installera
quel qu'en soit le prix.
Débat avec Rafaat Mrad Dali. Paru dans le journal
l’Audace N°6 du 12 au 26 mai 2011